La démarche portfolio
La démarche portfolio est directement liée à l’harmonisation des normes européennes de l’enseignement universitaire mise en place par le processus de Bologne à partir de 1998. Ce dernier est en parallèle articulé à la stratégie de Lisbonne (2000) sur l’économie de la connaissance, essentiellement dictée par des enjeux économiques (employabilité, compétitivité et innovation). L’apprentissage par compétences est l’élément clef de cette harmonisation économique de la connaissance, orientée vers la professionnalisation au détriment parfois d’un humanisme désintéressé, professionnel ou non.
L’approche par compétences, essentiellement adaptative, est de facto politique : elle engage notre manière d’apprendre, de vivre, d’être et de travailler.
« Il faut distinguer l’outil qui servira de support à la démarche et la démarche elle-même.
Le portfolio est « un ensemble évolutif de documents et de ressources électroniques capitalisées dans un environnement numérique décrivant et illustrant l’apprentissage, les expériences, les compétences ou le parcours de son auteur au travers de différents flux d’informations. »
La démarche quant à elle renvoie à la réflexion de l’étudiant sur ce parcours. Si la démarche prime sur l’outil, il faut toutefois bien choisir son support. Comme on le verra plus loin, le choix de l’outil est fondamental car un outil peu fonctionnel ou inadapté peut très vite faire perdre de vue l’intérêt pour la démarche elle-même.
Il faut également rappeler que la démarche portfolio s’organise autour de 4 axes, qui idéalement s’articulent entre eux :
- le ePortfolio d’apprentissage dans lequel l’étudiant dépose des traces (documents, notes…) illustrant sa progression en regard des objectifs de sa formation ;
- le ePortfolio d’évaluation dans lequel l’enseignant ou les pairs peuvent évaluer une progression dans le développement des compétences ou acquis d’apprentissage présents dans le référentiel de sa formation ;
- le ePortfolio de développement personnel dans lequel l’étudiant peut, en regard de sa formation et de ses expériences, développer une réflexion sur le sens de son parcours et la trajectoire qu’il veut prendre ;
- le ePortfolio de présentation à travers lequel l’étudiant adapte sa présentation à la trajectoire qu’il vise. »
SOURCE : Stéphanie Favreau. Note sur la démarche ePortfolio. Enjeux, recommandations, éléments de méthodologie pour une mise en œuvre au sein de l’établissement, pp. 4-5. [Rapport de recherche] Université Paris Nanterre. 2019. hal-02950302
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TEXTE 1 : Bataille de la compétence et guerre contre l’école, par Frédéric Neyrac, Maître de conférences en sociologie, université de Limoges (2008)
Sans conteste, la mise en œuvre de la logique compétences a pacifié les relations professionnelles. Et ce n’est pas seulement du fait de cette représentation harmoniciste de l’entreprise dont elle est porteuse. La gestion par les compétences individualise fondamentalement la relation salariale. Tout se joue largement désormais dans un rapport totalement individualisé entre le salarié et le représentant de l’employeur, le « n + 1 » ou un membre de la direction des relations humaines. La gestion par les compétences s’incarne dans l’entretien d’évaluation (quel que soit le nom qu’on lui donne ici ou là). Un entretien présenté comme un moment de rencontre et d’échange, conduit de façon en général empathique mais où se scelle le destin du salarié. Reconnaîtra-t-on ses compétences ? Parfois, même si cette reconnaissance est souvent symbolique. Mais il pourra tout aussi bien être l’objet d’un jugement d’incompétence. Et ce n’est pas seulement le travail réalisé qui est en jeu, puisque c’est la personne même qui est évaluée, son implication, son autonomie, ses compétences relationnelles, son savoir-être, notions floues, bien qu’elles soient opérationnalisées, nous dit-on, dans des référentiels de compétences. Des référentiels, qui ont été souvent négociés collectivement et rendent dès lors difficile la contestation de leur usage (et de leur verdict) par le salarié en entretien. La transparence et l’objectivité du référentiel masquent mal l’arbitraire et l’impérialisme d’un jugement de compétences qui porte non seulement sur ce que font les gens mais sur ce que sont les personnes.
C’est aussi dans ce tête-à-tête de l’entretien individuel que s’opère la dénégation d’une compétence, celle du métier. On enjoindra alors le salarié de changer de fonction : le technicien de cette ancienne administration sera appelé à devenir téléconseiller dans la nouvelle entreprise de communication et de réseaux. Et s’il invoque son statut de fonctionnaire, on lui imposera alors une mobilité géographique et un éloignement qui le feront vite revenir à plus de réalisme. Au-delà de ce qui dans la prospective sur l’évolution des métiers pourrait être discuté (dans cet exemple, l’idée que l’on a besoin de commerciaux, de téléopérateurs et moins de lignards), il faut imaginer le retentissement sur les individus concernés de cette remise en cause de leur professionnalité (« votre métier n’existe plus ») et de l’injonction à la mobilité permanente. »
SOURCE : Le travail à l’épreuve de la compétence. Frédéric Neyrat, in Savoir/Agir 2008/1 (n° 3), pages 31 à 36. Mis en ligne sur Cairn.info le 01/08/2014 : https://doi.org/10.3917/sava.003.0031
TEXTE 2 : Note sur la démarche ePortfolio (2019), par Stéphanie Favreau, Docteure en philosophie, Ingénieure pédagogique à l’université de Paris.
La démarche portfolio, avec toute l’ambiguïté qu’elle porte puisqu’elle peut aussi bien être vue comme entérinant les injonctions à l’autonomie et à la responsabilité, peut-être utile en ce qu’elle permet à chacun de trouver ce qui fait sens pour lui-même en regard de ce contexte et de transformer « une responsabilité assignée en une responsabilité assumée. »
Si le détour par les travaux d’Ehrenberg et le volet d’analyse critique de Gauthier et Pollet est utile, c’est parce qu’il permet de faire comprendre que le contexte politique, économique, social, aussi critiquable qu’il soit, est ce qu’il est. Il est constitutif des normes qui règlent les rapports sociaux tout comme le rapport des individus à eux-mêmes. C’est un contexte collectif, et même global, qui a produit l’individu contemporain tel qu’il est, qui le constitue jusque dans sa façon de penser. Les étudiants, les enseignants, l’ensemble des personnels de l’université sont situés dans ce contexte.
Libre à chacun de le combattre au travers de ses engagements personnels, citoyens, syndicaux… mais dans le cadre d’une mission de service publique, on ne peut pas faire comme si ce contexte n’existait pas alors qu’il va toucher de plein fouet les 95% d’étudiants qui vont devoir s’insérer sur le marché du travail. Accompagner les étudiants dans une démarche réflexive est au contraire très certainement le meilleur moyen de former des citoyens éclairés, qui ne seront pas dupes du contexte dans lequel ils évoluent, mais qui auront appris à réfléchir à la façon dont, dans ce contexte, ils peuvent s’insérer en fonction de ce qui peut encore faire sens pour eux. « L’écriture réflexive [à laquelle encourage la démarche portfolio] a une visée herméneutique (produire le sens de sa vie), émancipatrice (se structurer, s’autoriser à) et agentive (mobiliser les ressources pour agir). »
SOURCE : Stéphanie Favreau. Note sur la démarche ePortfolio. Enjeux, recommandations, éléments de méthodologie pour une mise en œuvre au sein de l’établissement, p. 9. [Rapport de recherche] Université Paris Nanterre. 2019. [En ligne : https://hal.science/hal-02950302/document]
DOCUMENT 3 : Franck Lepage, Les compétences tuent le métier (Conférence gesticulée, 2017)
LIEN : https://www.youtube.com/watch?v=nd30eTRjSIw
DOCUMENT 3 bis : Luc Carton, philosophe : Entretien avec F. Lepage sur les compétences (2017)
Rappel : Présentation de la démarche par Patricia Boulain & Évelyne Maignan + accès à UMTICE avec code (21MA)
- Comment remplir les tableaux « Mes compétences » (p.15) (EXEMPLE) ?
E-PORTFOLIO après 3 ans (avec l’accord des auteur.es) :
- EXEMPLE 1 d’un étudiant de BUT 3 GEA (2024).
- EXEMPLE 2 d’un étudiant de BUT 3 GEA (2024).
- EXEMPLE 3 anonyme (pas de nom, pas de trace) d’un.e étudiant.e de BUT 3 GEA (2024).
OUTILS POSSIBLES de publication en ligne :
- https://mahara.org/
- https://genial.ly/fr/
- Ou le site dédié de l’Université du Mans : https://eportfolio.univ-lemans.fr/
Le dossier Connaissance de soi (portfolio) permet de faire un premier tour d’horizon de la personne que vous êtes, de vos goûts, de vos occupations, de vos connaissances, de réalisations personnelles ou collectives, de votre parcours scolaire | universitaire, éventuellement professionnel (jobs d’été).
Ce dossier, que vous partagerez avec moi pour suivi et évaluation finale, inclut le travail proprement dit sur l’une des 3 compétences développées (exemple) en première année, selon la page Portfolio BUT1 du Programme National du BUT GEA.
A ce stade, en BUT 1, il n’est pas nécessaire de produire un support en ligne, mais vous pouvez aussi proposer des ébauches, à partir d’une page linkedIn par exemple, ou directement sur le logiciel Mahara.org, plébiscité par les IUT.
L’assiduité est obligatoire pour obtenir une note.
Partagez avec moi le document Connaissance de soi sur G-Drive à l’adresse icare@univ-lemans.fr en autorisant les commentaires. Merci.
(Je ne note pas les dossiers après le dernier TD)
Le document Connaissance de soi devra obligatoire proposer le traitement de l’une des 3 compétences du BUT1.
J’évalue avec vous les améliorations au fil des trois TD de 2 heures et nous décidons ensemble d’une note finale.
L’assiduité est obligatoire pour obtenir une (bonne) note.